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Fraude/télécom: James Claude « l’afrique perd près de 10 milliards usd par an »

Avril 20, 2021 | Entrevue
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By Kerry van der Mescht

Par: Sylvain MANIONGUI.

Le développement rapide des services numériques et des services financiers mobiles en Afrique se heurte à la montée de la fraude télécom, qui cause d’énormes pertes économiques au continent. Mettre en place des mécanismes adaptés pour amoindrir  ces pertes évaluées à près d’une dizaine de milliards de dollars devient l’un des principaux défis à relever pour les gouvernements africains. Le  PDG de Global Voice Group, James Claude cite la réglementation et la sécurité comme les principaux défis du continent. Dans cette interview accordée à notre média, l’homme à la tête de cette entreprise parle du développement des TIC en Afrique et de la nécessité pour les Etats de se doter en infrastructures adaptées.

Groupe Congo Médias: Quelle présentation pouvez-vous nous faire de GVG ?

James Claude: Global Voice Group (GVG) est un fournisseur mondial de solutions TIC et RegTech pour les gouvernements et les organismes de réglementation. Nous assistons les gouvernements et les autorités, par le biais de l’analyse du Big Data, dans leur transformation numérique et dans la promotion efficace d’écosystèmes numériques conformes et réellement inclusifs. Nous surveillons, recueillons et analysons les données provenant des secteurs économiques clés, dont les télécoms et les services financiers, et les transformons en informations exploitables. Cette approche permet une prise de décision basée sur les données.

GCM : Dans quels domaines intervenez-vous et quels sont vos principaux défis en Afrique ?

J.C : GVG, à travers ses outils numériques, s’insère dans des écosystèmes qui évoluent rapidement vers la numérisation, comme les secteurs des télécommunications ou de la finance. Depuis plusieurs années, l’Afrique connaît une croissance incroyable des services numériques et des services financiers mobiles, ce que la pandémie de Covid et l’obligation de distanciation sociale ont renforcé. Revers de la médaille, cette croissance s’est doublée d’un pic de fraude télécom, comme la fraude à travers le SIM boxing, les vols de mobiles ou même la cybercriminalité. Plus concrètement, l’Afrique perd près de 10 milliards USD par an, en raison des activités illégales facilitées par la téléphonie mobile et l’Internet. Plus précisément, 150 millions USD sont perdus à cause de la fraude SIM box, 3,5 milliards en raison de la cybercriminalité et 5 milliards du fait de la fraude mobile chaque année. Les principaux défis portent donc sur la réglementation et la sécurité dans ces secteurs, deux tâches majeures qui incombent aux gouvernements et aux autorités concernées.

GCM : Lors de la session virtuelle que vous avez animée le 18 mars dernier sur le rôle stratégique des données dans la protection des recettes en Afrique, vous avez souligné la nécessité pour les pays du continent de se doter d’infrastructures adaptées. Comment évaluez-vous le rythme de croissance de la transformation digitale en Afrique ?

J.C : La transformation numérique est un fait en Afrique. Elle se déroule sous nos yeux depuis plusieurs années mais, heureusement ou malheureusement, la crise sanitaire lui a donné un coup de fouet. La pandémie a permis à l’Afrique de mesurer l’importance de la numérisation et la nécessité pour les gouvernements d’en tenir compte au moment d’établir leur budget annuel. Les États sont maintenant davantage conscients du besoin d’investir dans les infrastructures et services technologiques pour pouvoir faire face aux principaux défis liés au développement de la société. Certains pays ont établi comme priorité pour les prochaines années le développement d’une société éclairée en promouvant les infrastructures et les technologies numériques pour améliorer la prestation de services ; d’autres sont centrés sur la mise en œuvre d’un programme de numérisation dans le secteur public, avec le même objectif. Pour beaucoup de ces pays, la protection de leurs transactions et systèmes numériques en général est devenue une priorité. Maintenant que ce premier pas a été fait, ils doivent se procurer les outils qui leur permettront d’obtenir une vue d’ensemble de ces secteurs, de prendre des décisions reposant sur des données factuelles et d’allouer les ressources appropriées aux différents projets.

La prise de conscience de la nécessité de la numérisation et sa progression vont crescendo sur le continent. Je suis sûr que dans quelques années, quand nous regarderons en arrière, nous serons fiers de ce que l’Afrique a accompli.

GCM : Quelles sont les solutions que Global Voice Group propose à ses clients ?

J.C : Les solutions de GVG sont des solutions numériques qui améliorent considérablement la surveillance des secteurs clés de l’économie tels que les télécommunications et les fintechs, tout en optimisant la mobilisation des revenus et la conformité fiscale. Les solutions de GVG sont organisées en trois catégories : Visio Suite, qui apporte un soutien efficace à tous les aspects de la réglementation des télécoms, Fin X, qui s’attaque au problème croissant de la conformité des transactions numériques concernant l’argent mobile et les envois de fonds, et SafetyNet qui concerne la sécurité numérique. GVG dispose par ailleurs d’un service conseil reposant sur les renseignements de mobilité pour la prise de décisions, Mobility Intel. Cet outil comprend des fonctionnalités de positionnement mobile, fournit des informations exploitables grâce à des données sur la mobilité de la population et aide à l’analyse prédictive des tendances de la mobilité pour divers objectifs (migrations, tourisme, planification urbaine, etc.).

En résumé, le dénominateur commun de nos solutions numériques est d’être basées sur l’analyse du Big Data, de combattre la fraude dans différents secteurs tout en favorisant la croissance de ces derniers. GVG répond efficacement aux défis numériques des gouvernements et des organismes de réglementation en leur proposant des outils numériques de pointe, conformes aux lois sur la protection de la vie privée.

GCM : Peut-on affirmer à ce jour que les Etats africains sont assez outillés pour garantir une meilleure protection des recettes en Afrique quand on sait que certains d’entre eux ne disposent pas de data center ?

J.C : En Afrique, la mobilisation des recettes va crescendo, mais elle demeure insuffisante pour financer le développement des pays, sur fond de diminution de l’aide au développement. Dans ce contexte, les pays africains doivent opérer une transition et tout mettre en œuvre pour remplacer l’aide par des ressources domestiques, a fortiori dans le contexte du Covid, qui pèse lourdement sur les ressources publiques et menace les progrès accomplis en matière de mobilisation des ressources intérieures. Dans le processus de reprise économique, il est primordial d’explorer de nouvelles voies pour mobiliser des ressources intérieures afin de compenser le déficit de financement créé par la pandémie. Un outillage numérique adéquat s’avère dès lors indispensable pour garantir une meilleure protection des recettes en Afrique.